• Quand elles étaient toutes petites, je n'ai jamais acheté de maillots deux pièces à mes filles.

    Parce que je ne voyais pas l'utilité de mettre un haut alors qu'il n'y a rien à cacher.

    Pire que ça, je crois que quelque part, les hauts de maillots pour les petites filles me posent deux réels problèmes : d'une c'est relou à mettre et de deux, je crois que (pour moi, uniquement pour moi), ça sexualise des enfants. Pour moi, le soutif est un truc d'adultes. Quand il n'est pas juste confortable, il est l'objet de fantasme. Alors, du fantasme sur mes gosses... Bof.

     

    Bref.

    Le temps a passé. Les deux grandes n'ont plus été des petites filles, mais bel(les) et bien des jeunes filles.

     

    On s'est longtemps contentées de brassières.

    Et il a fallu évoluer. Parce qu'elles le voulaient aussi.

     

    La première fois qu'on a acheté un vrai soutien-gorge, on a voulu faire les choses bien.

    Mères et fille nous sommes allées dans un magasin de lingerie. Une grande chaine, mais un truc spécialisé pour qu'elle ait la bonne taille, un truc qui lui va bien (c'est technique, les soutien-gorges).

     

    La vendeuse a demandé :

    - Tu veux quel genre ? Un truc mignon ? Du simple ? De la fantaisie ?

    - Simple, on a répondu, Mère et fille d'une seule voix.

    - Vous avez raison, a dit la vendeuse (on aurait dit mignon, elle aurait certainement répondu la même chose)

     

    Ma plus si petite fille est allée dans la cabine. Je suis restée dehors.

    Elle a essayé plusieurs modèles. La vendeuse a validé les bons.

    Moi aussi.

     

    Et puis, elle a eu cette phrase étrange :

    - Tu vois, dans ce modèle là, il y a une coque. Si tu veux tu peux l'enlever mais souvent les filles de ton âge les laisse, parce que ça cache les tétons et les garçons de ton âge sont vraiment pénibles avec ça.

     

    Je n'ai rien dit, j'ai hésité entre l'hallucination totale et la "shocking grave"

    Ma fille, très grande d'un coup a dit : Ouais, je vais les laisser, c'est vrai qu'ils sont relous avec ça.

     

    Donc, ma fille se sent obligée de se cacher pour éviter les remarques reloues des garçons du collège.

     

    Elle, elle a une autre version.

    Elle a dit : En fait, j'ai juste pas envie d'avoir à entendre des trucs débiles. Je préfère m'intéresser à d'autres choses.

     

    Ce n'est donc pas qu'elle n'assume pas son corps. C'est juste qu'elle n'a pas envie de se prendre la tête. Elle n'a pas envie de mener ce combat là. Elle se dit que ça passera... comme l'âge bête. Ou qu'un jour, elle aura l'énergie de se battre pour la liberté d'expression de ses tétons.

    Elle est donc obligée de mettre des coques pour avoir une poitrine sans reliefs.

    Elle n'en fait pas une affaire d'état.

     

    Et puis, je me suis souvenue. Quand j'étais ado, c'était déjà comme ça, ce n'est rien de nouveau. Les mecs étaient relous avec les tétons. Ils tiraient sur nos soutien-gorges aussi.

    Pas tous.

    Pas tous du tout, mais ça arrivait hyper souvent.

     

    J'assume complètement mes tétons.

    J'ai 44 ans.

    On ne me fait pas suer avec ça.

    C'est donc facile d'assumer.

     

    Mes filles ont entre 29 et 32 ans de moins que moi.

    Elles ont un corps qu'elles découvrent.

    Elles sont au collège.

    On les fait suer avec des histoires de tétons.

    Elles ne sont pas soumises. Elles veulent éviter d'avoir à entendre des conneries.

    Elles pourraient se mettre les coques des soutifs dans les oreilles, ça aiderait... Sauf qu'elles n'entendraient plus les trucs chouettes et malins que les gamins se disent aussi.

     

    Alors on fait quoi ?

    On éduque mieux les garçons. On instruit les filles aussi.

    Oui, on le fait. On essaie.

    Peut-être qu'un jour les ado (filles ou gars) cesseront d'être cons.

    Peut-être qu'un jour enfin, les filles et les femmes auront la paix.

    Avec la paix on a la liberté.

    Avec la liberté on a le pouvoir d'être ce qu'on veut.

     

    En attendant, elles laissent les coques de leurs premiers soutifs.

    Elles cachent leur tétons pour éviter les conneries et profiter de trucs meilleurs.

     

    Cet article, ça fait un paquet de mois que je me dis que je dois l'écrire. Et puis, j'ai eu d'autres trucs à faire, à dire, d'autres combats à mener. Comme mes filles avec leurs coques de soutien-gorges, j'ai eu d'autres tétons à fouetter, en somme.

     

    Et puis, il y a eu toute cette histoire de bouquin au contenu très critiquable mais tombé sous le coup d'une vindicte populaire. Je crois que je préfère que des livres cons existent pour qu'on puisse avoir un débat, qu'on puisse parler, discuter, dénoncer plutôt qu'ils soient supprimés.

    Je ne peux pas m'empêcher de penser que cette forme de censure populaire peut avoir des effets pervers. Si j'étais d'accord pour dire que le bouquin avait un contenu très limite, je n'ai pas le monopole de la bien-pensance.

    Je ne peux m'empêcher de penser que, si ça se trouve un jour 150 000 personnes signeront une pétition pour faire supprimer un bouquin qui ne leur plait pas, qui ne correspond pas à leurs valeurs. Un bouquin sur l'homoparentalité. Un bouquin sur l'accueil des réfugiés...

    Ça pose de réels questions. Personne n'a le monopole du bien penser.

     

    En attendant, j'hésite parfois à prendre les coques des soutifs de mes filles et me les coller sur les yeux pour ne pas avoir à lire de conneries sexistes... J'hésite !

     

    Allez, love sur vous !

    Je suis sur FB et sur IG

     

    (alors, je préviens, je ne défends pas le bouquin en question, je trouve les deux seules pages que j'ai vues abjectes. Je me questionne simplement... )

    Sinon, nous sommes allées à la Halle de Glisse avec la cadette.

    Il y avait 2 filles... et une vingtaine de mecs.

    Mais il y avait ma fille !!!

     

    Est-ce une bonne idée d'acheter un soutien-gorge à sa fille ???

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  • Nous partions vers les vacances, reposer un peu nos esprits et nos cœurs épuisés par trop de trop.

    Nous avions une super moyenne. Pas de bouchons, pas de drames.

    Il a bien fallu faire une pause pipi.

    Transformée en pause vomi par la benjaminette qui n'avait pas dû bien entendre l'objet de l'arrêt.

    Le temps de me retourner pour l'aider, j'entends hurler.

    Le petit dernier face contre graviers, dans les pieds d'une dame qui soupire que le gamin s'est pris les pieds dans les siens, qu'il saigne du front et que "pfffff... là, elle est au téléphone"

    On a ramassé le gamin, on a épongé avec une couche, non pas que ça saigné beaucoup, mais c'est tout ce que nous avions sous la main.

    On a hésité.

    Nous sommes allés aux urgences. Dans une ville qu'on ne connait toujours pas, quelque part entre Dijon et Troyes.

     

    C'est petit. C'est une salle avec quelques sièges. C'est sombre. C'est sonore.

    Très sonore.

    On ne voit rien, on entend.

     

    Ce monsieur venu avec sa maman. Pas pour elle, mais pour lui.

    Il vomit aux toilettes.

    C'est sonore comme endroit.

    La vie de chacun devient celle de tous.

    C'est le moment où l'infirmière l'appelle. La maman se lève doucement, elle tape à la porte des toilettes.

    "Dépêche toi, un peu", elle dit.

    Il sort pour rentrer dans la salle des infirmières, avec sa maman.

    C'est sonore comme endroit.

    - Donc vous vomissez du sang. Vous avez un problème d'estomac, un ulcère ? Ah ! Un cancer... Donc, vous n'êtes pas suivis pour ce cancer. Et votre problème d'alcool ??

     

    Il ne ressort pas du bureau des infirmières. Il passe de l'autre côté.

     

    On regarde le petit dernier. On essaie de parler fort mais pas trop pour ne pas gêner. Juste pour couvrir ce qu'on ne devrait pas entendre.

     

    Et puis, finalement c'est notre tour. Elles sourient.

    Les infirmières demandent ce qui s'est passé. On raconte.

    Elles soupirent. Les gens !

    Elles regardent le front du petit dernier.

    On va demander l'avis au médecin, mais a priori, ça sera juste un peu de colle.

    On ne passe pas de l'autre côté du couloir. On nous met juste derrière le rideau. Pas loin, parce que ça n'est pas grave.

     

    L'interne vient. Il hésite. Il appelle le médecin.

    Non, pas de points, de la colle, c'est ce qu'il faut.

     

    Ils repartent et les patients se succèdent de l'autre côté du rideau.

     

    La vie de chacun deviennent celle de tous.

     

    Il pleure. Elle essaie de rassurer.

    Il déballe tout.

    Il a trouvé un travail.

    (c'est bien ça un travail)

    Il est chauffeur routier.

    Mais sa femme veut le beurre et l'argent du beurre. Et veut l'argent du salaire et la disponibilité du bonhomme. C'est elle qui voulait qu'il retravaille. Elle fait des scènes et des crises et lui, il n'en peut plus. Il est venu parce que sinon il se serait balancé avec son camion dans un virage.

    (Ah non, faut pas faire ça, monsieur)

    Et puis, sa fille, sa fille unique qui a 3 ans, qui est sa vie lui a dit qu'elle ne l'aimait pas.

    (Mais elle ne le pense pas. Elle dit ça justement parce qu'elle vous aime, vous lui manquez)

     

    Alors, il passe de l'autre côté du couloir.

     

    Et la colle ?? L'interne est désolé. Il n'y en a plus dans le frigo. Il va appeler la pharmacie centrale. Il faut patienter.

     

    De l'autre côté du rideau, on entend une dame. D'un coup elle dit tout :

    Ben, je ne sais pas trop ce qui s'est passé. J'étais juste à côté, je viens voir mon père, il ne va pas bien mon père, c'est pour ça qu'il est à l’hôpital. Et puis, plus rien. Alors, je suis là. Je crois que je suis tombée dans les pommes. Mais pourtant ce midi, j'ai bien mangé. J'ai pris du boudin, à midi. Je n'aurais pas dû tomber dans les pommes, parce que le boudin, c'est bien, c'est plein de fer. On ne doit pas tomber dans les pommes quand on a mangé du boudin... Alors, je ne sais pas bien pourquoi je suis là. En fait si, je sais, je vais voir mon père, mais il est de l'autre côté, parce qu'il ne va pas bien. Alors que moi, j'ai mangé du boudin.

    Elle passe de l'autre côté du couloir.

     

    Et la colle ? La pharmacienne va venir, dit l'interne. On ne sait pas quand. Ça dépend de son professionnalisme, il dit.

     

    Derrière le rideau, on entend encore, ça permet d'attendre, même si on préfèrerait ne pas entendre.

     

    - Bonjour Mademoiselle ! Tu es tombée ? Tu as mal ? De 0 à 10, dis-moi ?

    Presque enjouée, l'ado dit que oui, elle est tombée, que pffffff... de 0 à 10, houlà, c'est au moins 7 ou 8.

    L'infirmière prend le temps qu'il faut.

    La maman est inquiète.

    L'infirmière non.

    Elle les envoie dans un autre couloir, pas de l'autre côté. Non, a priori pas de radio... Un peu de doliprane, ça devrait aller.

     

    On regarde les affiches sur le mur. Le mode d'emploi pour mettre la colle. Resserrer les berges de la plaie, appliquer. Ça à l'air bien, quand on a la colle, quoi.

     

    - Houlàlà ! Comment vous vous êtes fait ça ? Avec une scie... Ah ouais... Bon. On va tout de suite appeler SOS mains, parce que là, nous on ne peut pas traiter ça. Il faut un spécialiste, parce que vous êtes arrangé quand même. Je vous donne tout de suite un anti-douleur. J'appelle tout de suite l'autre hôpital

    (oui, bonjour, c'est les urgences de ***, on a un monsieur avec une vilaine blessure à la main (...) Ah ? Bon ? Vraiment aucune place... Bon, j'appelle l'autre service (à 200 km))

    (oui, bonjour, c'est les urgences de ***. Oui ? Pas avant demain à 9h00 ??? Mais on fait quoi avec ce monsieur ? Il faut que vous le voyez ! Oui, on peut le garder, mais vous devez le prendre, c'est urgent, ce sont les urgences. A 9h00, c'est demain, demain c'est loin, c'est tard. (...). Bon...)

    Elle dit qu'elle va essayer de lui enlever son alliance sans lui faire mal. Il crie. Il a mal.

    Elle dit qu'il faudrait couper l'alliance, mais elle a peur de faire pire.

    Il garde son alliance... Et peut-être ses doigts. Jusqu'à demain, 9h00

     

     

    Il est grand.

    Il roule les R.

    Il a des lunettes sur le front, peut-être pour ne pas tout voir.

    Sauf qu'il voit très bien que le petit dernier n'en peut plus d'attendre et d'entendre.

    Il prend un lampe.

    Il dit que ça suffit.

    Il attrape deux strips.

    A défaut de colle, on aura du scotch.

     

    On repart. A nos vies à nous. Légères finalement.

     

    On pense à ces infirmières. Leur vie c'est celle des autres aussi. Tous les jours entendre les souffrances, les vies cabossées, chercher la colle qui ne viendra jamais.

    Nous ne sommes restés qu'une heure derrière le rideau.

    Tous les jours elles sont devant le rideau. Elles font passer les gens de l'autre côté du couloir.

     

    Nous, nous sommes remontés dans le camion jaune.

    Elles, elles ont continué à écouter, à regarder, à consoler.

    La vie des autres, c'est aussi la leur.

     

     

    (un grand merci à tous les soignants, qui font au mieux. Forcément, j'ai pensé à Baptiste Beaulieu, si vous ne connaissez pas, allez zieuter "Alors Voilà", ça remet la réalité en face, la réalité en humanité aussi)

     

    Je suis sur FB et sur IG

     

     

    Est-ce une bonne idée d'aller aux urgences ???

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